La dernière rose de l’été : le côté obscur du paradis.
par Robert
Laplante
Je ne sais
pas. C’est peut-être la proximité d’un mois de novembre pluvieux, la froideur
qui commence à régner dans les rues de Montréal ou la perspective prochaine du
changement d’heure, mais l’été me manque. Surtout ses couleurs bigarrées,
chatoyantes, ses odeurs qui sentent bon le bonheur et le farniente et son
soleil ivre de plaisir et de vie. C’est cet été fantasmé que j’ai retrouvé dans
La dernière rose de l’été, un séduisant polar dessiné de Lucas Harari.
Léo, un
jeune adulte parisien qui rêve de devenir romancier, bosse dans une buanderie.
Un travail alimentaire en attendant de trouver l’inspiration qui lui permettra
d’écrire son Goncourt. Un soir, entre deux brassées, il y croise par hasard, son
cousin. Un cousin qu’il n’a pas vu depuis des plombes. Ce dernier lui propose
d’habiter sa maison de vacances au bord de la mer. C’est que monsieur doit
partir en croisière avec sa maitresse et qu’il a besoin de quelqu’un pour
surveiller les ouvriers qui y font des rénovations. Voilà une offre que Léo ne
peut refuser. D’autant plus qu’il n’aura rien à faire, que de se reposer et
d’attendre la visite de l’inspiration.
Malheureusement, même le
paradis cache sa part d’enfer. Leo se retrouvera vite au cœur d’une relation
tordue et malsaine entre sa séduisante, capricieuse et insaisissable voisine
Rose et son père blasé, laconique et possessif.
Polar intimiste : La dernière rose de l’été séduit. Séduit par son ambiance mystérieuse hitchcockienne, le Hitchcock de Marnie,
et son parfum de Nouvelle Vague.
Manifestement,
Harari connait ses classiques. Il sait disséminer avec parcimonie les indices
nécessaires pour bien comprendre son intrigue et garder notre attention. Parce
que si la BD fascine autant ce n’est pas tant à cause des rebondissements, des
coups de théâtre ou des révélations que de l’hypnotique climat de mystère qui
se dégage de chaque case. Véritable maitre en matière d’ambiance, l’auteur tisse
imperceptiblement une toile aussi fascinante que malsaine autour du lecteur.
Magnifiquement
illustrée par le diplômé des Arts décoratifs de Paris, La dernière rose de
l’été est un véritable plaisir pour les yeux. La grâce épurée de son trait,
son esthétique léchée, ses couleurs éclatantes et riches, ses larges cases, ses
représentations sensuelles des riches villas sur les falaises et sa mer, aussi apaisante
qu’inquiétante, s’imprègnent dans notre mémoire dès la première page.
La
dernière rose de l’été est une sympathique bande dessinée qui réchauffe et énergise au moment où
le spleen de l’hiver qui s’en vient commence à envahir mon optimiste proverbial.
Lucas
Harari, La dernière rose de l’été, Sarbacane.
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