Spirou chez les fous : Voir Angoulême et… y être interné

 

                                                             


Par Robert Laplante

Vous connaissez le syndrome de Jérusalem? Non! Pourtant, on en a beaucoup parlé au tournant du millénaire. C’est un étrange désordre qui atteint certains touristes en visite dans la ville sainte. Écrasés par l’omniprésence et la puissance de ses symboles religieux, ils finissent pas se prendre le temps d’un moment, pour un personnage biblique.

Alors au syndrome de Jérusalem, il faut maintenant ajouter une variante, celle d’Angoulême. À la différence que dans cette ville, on ne se prend pas pour Jésus, Moise, Elie ou Samuel, mais plutôt pour Tintin, Blueberry, Gil Jourdan, Naruto, Garfield et autres Captain America.

Si nous connaissons maintenant ce syndrome, c’est grâce à Spirou et à Fantasio. En enquêtant sur l’étrange séjour de Fantasio dans un institut psychiatrique d’Angoulême, Spirou est confronté à ce désordre ainsi qu’à cette inquiétante clinique où les patients sont enfermés contre leur gré, évidemment. Un hôpital plus que louche où l’on pratique des expériences chirurgicales aussi illégales que peu éthiques, dignes de celles pratiquées par le docteur Moreau d’H.G. Wells.

Nouvel opus du Spirou verse, quel horrible nom calqué sur les univers de Marvel de DC, sans doute pour faire plus branché — Spirou chez les fous est une sympathique bédé, plein d’ingénieuses trouvailles et d’hilarants moments d’humour. Une nouvelle aventure qui nous fait passer un très bon moment sans pourtant être inoubliable.

Ce nouveau Spirou a tout pour nous faire passer un excellent moment. Il y a bien sûr l’humour de Jul toujours aussi délirant, absurde, potache, plein de répliques savoureuses et de grands moments de rire tonitruants. Parce que oui, Jul me fait rire. Pas d’un petit rire discret, oh que non! Mais bien, un grand rire franc et bruyant. Il n’y a pas que l’humour de Jul. Nous avons aussi le dessin de Libon, plein de bonhomie communicative. Un trait presque cartoonesque qui ajoute une dimension déjantée à une généreuse pantalonnade incontrôlable. Une irrésistible farce sans temps mort, où les facéties se succèdent à une vitesse vertigineuse comme dans les meilleures comédies de Gérard Oury ou de Francis Veber. Des blagues qu’on ne voit pas toujours venir et qui nous surprennent et d’autres qu’on prévoit, mais qui nous font tellement plaisir. Bref, je me suis amusé ferme dans cette incursion angoumoisine de Spirou et de son petit univers.

Hélas si les gags sont excellents, si on rigole en masse à sa lecture, si le rythme est là et si je m’y suis beaucoup diverti, il convient que l’album, une fois terminé, m’a un peu fait penser à du popcorn. C’est-à-dire des calories vides qu’on adore manger et qu’on oublie rapidement une fois ingéré.

Comme, si les auteurs ne maîtrisant plus comment compléter le récit, précipitent sa fin en rattachant maladroitement entre eux, les fils qu’ils ont tissés.. Avec le résultat que la fin bancale de ce Spirou vient légèrement ternir la douce folie du reste de l’album.

À moins que ce ne soit à cause de leur propension à multiplier les gags au détriment de l’efficacité narrative. Vous savez comme ces comédies cinématographiques prétextes à une succession de plaisanteries dont l’histoire ne tient pas toujours la route et qui ne passent pas l’épreuve du second visionnement.

                                         


Et c’est dommage parce qu’avec une conclusion mieux échafaudée il est indéniable que cette incursion de Spirou dans l’humour burlesque aurait été une très belle réussite. Comme jadis Franquin le fit : Bravo les Brothers une de mes aventures préférées de Spirou.

Mais ça, ce n’est pas vraiment important. L’important c’est d’y avoir du plaisir. Et pour en avoir, on en a, croyez-moi.

Jul, Libon, Spirou chez les fous. Dupuis

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