Un étonnant puzzle

                                                                        

Trust

de Hernan Diaz

Prix Pulitzer 2023

Éditions de l,Olivier

400 p

Et nous conclurons ce mois d’octobre avec un prix et pas n’importe lequel  : Le Pulitzer. C’est un roman étonnant qui traite de riches familles new-yorkaises, d’empires avant, pendant et après la crise de 1929. Est-ce un pastiche réussi du grand Gatsby de Francis Scott Fitzgerald, peut-être, mais, les quatre récits que vous allez découvrir sont des petits bijoux en soi, puisqu’ils mystifient en quelque sorte le lecteur.

Trust pour faire confiance, mais aussi une concentration financière qui réunit plusieurs entreprises pour finir par avoir la main mise sur un ou de secteurs de l’économie. Jamais violent, feutré comme dans les salons auxquels le commun des mortels n’avait pas accès.

Tout commence avec Benjamin Rask ! "Qui a bénéficié de presque tous les avantages depuis sa naissance ". Fils, d’un industriel légendaire, pionnier en la matière de fusions et de coups risqués, sa fortune ne fit que s’agrandir au fil  des ans. Une crise cardiaque arrêtera son élan et Benjamin se retrouva donc à la tête d’un empire. Sans être antipathique, il n’aime peu ou pas la compagnie des humains et préfère de loin celle des chiffres ainsi que la solitude de son bureau. Il réussira, bousculera l’ordre établi tout en «  essayant » de frayer avec la bonne société. L’amour courtois viendra cogner à sa porte, et sa douce épouse Hélène, philanthrope avant l’heure, s’impliquera beaucoup dans les arts avant de sombrer dans ce qu’il est convenu d’appeler la schizophrénie. La suite sera triste, mais il investira beaucoup dans le pharmaceutique tout en sachant que le départ de sa femme le conduira à devenir un homme encore plus riche, mais sans avenir. Ce premier chapitre finement ciselé est le miroir d’une époque et il fallait le talent de cet écrivain pour nous en décrire les rouages tout en faisant naître une des plus singulières histoires d’amour.

La deuxième section, moins structurée, mais oh combien passionnant, nous éclaire sur le fameux Benjamin à travers la voix d’Andrew Bevel qui se révèle être son double. Et qui sait si tout cela n’est qu’une invention ?

Le troisième chapitre : Une mémoire, remémorée », donne la parole à Ida Partenza. Anarchiste par son père, elle est embauchée par le puissant nanti Andrew Bevel dont elle va en quelque sorte réécrire les grandes lignes d’une vie qui lèvera bien des zones d’ombre.

Répétons-le. C’est un roman fascinant qui tient autant du «  doux roman policier » que l’évocation d’une Amérique conquérante, loin des yeux du simple motel. Un exercice littéraire somptueux, une explication des rouages de l’industrie financière, des portraits attachants ou non. Un peu de tout de cela. Soufflant. À glisser sous le sapin si vous pouvez attendre jusque là !