Orson Welles l’artiste et son ombre : Voyage au cœur d’une énigme.

                                               


  

Par Robert Laplante

Est-ce que tous vos cadeaux sont achetés ? Pas encore ! Heureusement, j’ai encore deux petites suggestions qui devraient en rendre heureux plus d’un.

Voyage au cœur d’une énigme

J’ai entendu parler d’Orson Welles pour la première fois à la télévision, lors de l’émission hebdomadaire Les Mystères d’Orson Welles, qui était la traduction française de la série britannique Orson Welles Great Mysteries d’ITV. Orson Welles était un comédien imposant, à la fois physiquement et par sa présence, qui présentait une anthologie de courtes histoires mystérieuses avec un cigare à la bouche, un chapeau à larges bords et une cape noire énorme.

                              


Bien que la série m’ait laissé une impression à l’époque, c’est au cégep que j’ai découvert son œuvre et sa personnalité. Depuis, il continue de susciter mon admiration.

                                         


Personnage plus grand que nature, il est un mystère indéchiffrable, une énigme insoluble pour les majors hollywoodiennes. C’est un réalisateur hors norme et un comédien monumental. Sa simple présence suffisait à marquer un film. On pense au Troisième homme de Carol Reed où sa courte présence devient le moment fort du film, 


                           


un peu comme celle de Brando dans Apocalypse Now.

Il semble que Coppola et Welles soient deux génies méconnus et rebelles d’Hollywood. Deux cinéastes de taille supérieure à la nature, presque shakespeariens, consumés par leur talent et leurs ambitions, et refusant de se plier aux règles imposées par la machine californienne de fabrication de rêves.

                                  


Youssef Daoudi, dans « Orson Welles, l’artiste et son ombre », offre une immersion impressionniste dans l’aventure Welles. En relatant des histoires brèves, il brosse un portrait complexe du personnage énigmatique, tentant de capturer, pendant un court instant, cette figure insaisissable.

                                               


S’éloignant de la biographie traditionnelle, le bédéiste imagine un échange improbable, mais fascinant, entre un Welles âgé et Orson. Comme si Welles racontait à son alter ego ses souvenirs.

Depuis ses débuts prometteurs comme enfant prodige, jusqu’à sa chute, en passant par ses premiers succès sur les planches et à la radio, puis son exil européen, son entrée triomphale à Hollywood, ses démêlés avec les pontes d’Hollywood et la critique américaine, Daoudi nous entraîne dans l’histoire tragique d’un Icare moderne, qui finira par s’écraser sur le boulevard des rêves anéantis et des passions trahies, après avoir brièvement effleuré le soleil hollywoodien.

                                        


Comme une chanson de Tom Waits, la biographie de Daoudi change constamment de tempo, de structure, se laisse tranquillement apprivoiser et nous enveloppe dans un climat aussi hypnotique qu’irrésistible.

À l’image du générique de sa série télé qui m’a tant marqué.

                                                 


Le plaisir des listes.

J’apprécie particulièrement les livres qui établissent des palmarès des indispensables. J’en ai pour le cinéma, la musique et les bandes dessinées, bien sûr. Cependant, je n’en avais pas encore trouvé sur notre bande dessinée. C’est maintenant chose faite, grâce à Jean-Dominic Leduc, homme de lettres, de théâtre, de médias et de bd, puisqu’il est aussi chroniqueur bédé pour : Les libraires et Le Journal de Montréal et figure incontournable de la médiation bédé

Jean-Dominic Leduc a eu la brillante idée d’écrire Quoi lire ? 25 bandes dessinées québécoise qui ont façonné le premier quart du XXIe siècle, un réjouissant petit bouquin qu’on doit absolument lire.

Leduc nous invite à explorer la richesse d’un art québécois décomplexé à travers les parfums de la bibliothèque idéale de Bernard Pivot. Un 9art qui n’hésite plus à emprunter toutes les voies graphiques et narratives et à explorer tous les genres possibles.

Du Petit astronaute à Vil et Misérable, en passant Mégantic un train dans la nuit, Chroniques du Centre-Sud, Ping Pong et autres Rescapés de l’éternité c’est tous nos Petits Mickeys qui passent sous son microscope aussi précis qu’enthousiaste.

Avec une verve rythmée et passionnée, Leduc décortique ses choix et leur importance dans notre paysage « bédéesque , » truffant ses réflexions d’inspirantes références à la bédé mondiale, au cinéma, au théâtre, à la littérature et à l’histoire. Le résultat est un petit bouquin de 118 pages qui se dévore avec plaisir. Même si je regrette légèrement de ne pas y avoir retrouvé Far Out de Langevin et Carpentier, même s’il le mentionne au détour d’une page, ou encore L’Ostie de chat de Zviane et Iris. Mais n’est-ce pas le rôle de ces exercices de nous confronter un peu ?

Un cadeau incontournable pour tous ceux qui pensent que notre bédé ne se résume qu’à un ou deux noms. Ceux mentionnés à Tout le monde en parle ou à la radio de Radio-Canada.

La bédé québécoise c’est beaucoup plus que cela et Jean-Dominic Leduc le montre avec éloquence.

Youssef Daoudi, Orson Welles, l’artiste et son ombre, Delcourt/Mirages.

Jean-Dominic Leduc, Quoi lire ? 25 bandes dessinées québécoises qui ont façonné le premier quart du XXIe siècle. BDQ

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