Torquemada, l’inquisition et Stephen King.
Robert
Laplante
Ça fait un
bail que je n’ai pas parlé des croquemitaines, ces horribles créatures qui
n’ont qu’un but : nous terroriser. Alors que le parfum de la rentrée
commence à se faire sentir, pourquoi ne pas terminer le mois de juillet avec
deux croquemitaines pas piqués des vers ?
Les
bûchers du vaniteux.
J’adore la collection :
La véritable histoire vraie publiée chez Dupuis, une série de BD
intelligentes, pleines d’humour et informatives. Bernard Swysen l’instigateur
du projet nous guide album après album sur les traces de certains fléaux de
Dieu qui ont marqué l’histoire de leurs mains ensanglantées.
Maniant
humour et rigueur historique Swysen et ses comparses dessinateurs décortiquent
leurs parcours et leur psyché avec la nuance des meilleurs vulgarisateurs
scientifiques. Après Caligula, Dracula, Hitler, Robespierre et Attila c’est
maintenant au tour de Torquemada de se retrouver sur le microscope de Swysen.
Si on disait
d’Attila que l’herbe ne repoussait jamais derrière lui. On pourrait sans se
tromper dire de même de Torquemada. Rien ne repoussait derrière l’homme
d’Église, ni les hommes, ni les femmes, ni les animaux, ni les plantes. Tout ce
qui ne correspondait à sa conception du bon chrétien était implacablement
écrasé par lui et ses sbires.
Parce qu’on
l’oublie souvent, mais Tomas de Torquemada, dont l’ancêtre était un juif
converti, fut un des pires monstres de l’histoire. Grand inquisiteur,
Torquemada instaura un régime de terreur en Occident, une cabale contre tout ce
qui ressemblait de près ou de loin à des entorses à son rigorisme religieux. Un
rigorisme qui proscrivait à peu près tout même l’humour et le rire. Rappelez-vous
Le Nom de la rose d’Umberto Eco. Un rigorisme religieux qui emporta dans sa
tornade sanglante ; juifs, convertis, musulmans, marginaux, savants,
contestataires et anonymes. Bûchers, tortures, autodafés, censure, délations
populaires et chantage fleuriront allègrement sous son règne.
Comme pour
les autres titres de la série, Swysen choisit judicieusement les anecdotes les
plus significatives et les restitue dans le contexte social, économique et
politique d’une Espagne en train de s’unir, de terminer la Reconquista et de
bouter hors de son territoire les derniers musulmans d’Andalousie. Le tout sur
fond de découverte de l’Amérique, des premiers pas de l’imprimerie et des
balbutiements de la Renaissance occidentale.
Appuyé par
le dessin hilarant de Marco Paulo, qui transforme Torquemada en un être
grotesque né d’une improbable union entre Don Martin et Édika, Swysen propose
une excellente bande dessinée qui explique la véritable nature de l’inquisition
et qui nous rappelle un monstre que notre mémoire collective défaillante a fini
par oublier.
Parce qu’il
fut un temps où l’Europe aussi était aux mains d’ayatollahs… mais chrétiens.
Le
monstre sans visage.
Flint City
est une petite ville américaine comme il y en a des tonnes. Une petite ville anonyme
et tranquille où tous se connaissent et aiment la tarte aux pommes. Alors quand
le jeune Franky Peterson est retrouvé sans vie et sodomisé, c’est toute la
petite ville qui réclame vengeance. D’autant plus que le principal suspect est
une célébrité locale, l’entraineur de la populaire équipe de baseball. Mais
s’il n’avait pas commis le crime, malgré les apparences ? Se pourrait-il que ce
soit un horrible croquemitaine issu du folklore mexicain et reconnu pour son
appétit pour les enfants qui en serait l’auteur.
Et si El Cuco existait
vraiment…
Nouveau
Stephen King publié au printemps L’outsider fait partie des très bons
Stephen King. Après quelques romans plus faibles, l’écrivain du Maine revient
en grande forme avec cette imposante brique de 570 pages. 570 pages de plaisir
où chaque page est parfaite, chaque mot utile, chaque détail important.
Avec l’aisance du vieux baroudeur à qui on ne la fait pas, King nous
guide dans une exténuante enquête policière où chaque hypothèse, même la plus
folle, peut s’avérer la véritable réponse.
L’outsider,
que j’ai dévoré en 3 jours, m’a rappelé combien King est un grand conteur qui élabore
avec l’implacable dextérité d’un horloger une intrigue captivante. Un
manipulateur de génie qui sait garder notre intérêt en disséminant intelligemment
et parcimonieusement les révélations troublantes. Un créateur d’atmosphère
exceptionnel qui nous fait vivre aussi bien l’angoisse des cavernes humides
d’un Texas torride, que l’insoutenable et hypocrite bienveillance des petites
villes américaines anonyme qui peut facilement tourner au cauchemar.
Manifestement
King sait encore me surprendre… et c’est tant mieux.
Bernard
Swysen, Marco Paulo, La véritable histoire vraie de Torquemada, Dupuis.
Stephen King, L’outsider, Albin Michel.
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