La chute : le futur c’est maintenant.
Par Robert Laplante
Le hasard
fait souvent bien les choses. Je ne pense pas que Futuropolis, en programmant
la sortie de La chute pour le printemps dernier, avait prévu la COVID-19.
Mais il reste que c’est une pandémie presque semblable qui est au cœur de cette
bande dessinée anxiogène signée Jared Muralt. Est-ce que la vénérable maison
d’édition fondée par Étienne Robial et Florence Cestac aurait le don de la
divination ? Hum, bien malin, qui pourrait y répondre, mais la coïncidence est
quand même étrange.
Quelque part
en Occident, dans un futur pas si lointain que ça. L’été n’a jamais été aussi
chaud. La pénurie d’eau potable et les températures excessives posent d’énormes
problèmes à l’agriculture locale. À un point tel que les récoltes risquent
d’être mauvaises.
Une
catastrophe de trop pour une planète déjà aux prises avec une récession mondiale
interminable et sur le point de sombrer dans le chaos. À cette situation il
faut rajouter l’irruption d’une grippe virulente qui fait déborder la charrette
de l’Ankou. Et comme si ce n’était pas assez les gouvernements n’ont que
l’instauration de zones de confinement comme unique traitement.
Des zones
qui se multiplient et s’élargissent à mesure qu’elle se répand. Abandonnées, par
les gouvernements elles deviennent inexorablement des no man’s land
violents, sans loi, sans justice et sans solidarité. C’est dans un de ces no
man’s land que vivent Liam et ses deux enfants. Que végètent Liam et ses
enfants, devrait-on écrire. Jusqu’au moment où devant la situation qui
périclite ils doivent organiser avec les moyens du bord une fuite qui semble
impossible.
Même si le bédéiste
bernois a commencé sa bande dessinée bien avant les ravages de la COVID-19 - c’est
plutôt l’urgence des changements climatiques et les effets de la grippe
espagnole qui ont été les éléments déclencheurs de La chute – on ne peut
s’empêcher de penser à notre situation actuelle. Comme l’ont fait beaucoup
d’auteurs de science-fiction apocalyptique du début des années 70.
.
Et même si
le scénario est plutôt classique, dans la lignée des autres œuvres du genre, le
dessin efficace traduit bien notre angoisse et notre impuissance devant une
situation incontrôlable, devant un monde sur le point de s’effondrer, devant un
mode de vie qui fout le camp, devant un avenir qui ne peut qu’empirer, et devant
notre inconscience à prendre les décisions nécessaires pour empêcher notre
propre destruction. Avec l’énergie du désespoir, Liam lutte pour offrir à ses
enfants de l’espoir. Celui d’un monde meilleur. Mais l’espoir peut-il exister quand
ce qu’il reste devant nous est un monde en pleine débandade au parfum de Mad
Max et de Jeremiah.
Une bande
dessinée qui avec la COVID-19 devient inquiétante. Parce que le futur, c’est peut-être
maintenant ?
Jared Muralt,
La chute, épisode 1, Futuropolis.
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