J’irai cracher sur vos tombes, le goût sucré de la vengeance.

 

                                                   


Robert Laplante

Il y a des titres qui sont tout simplement fabuleux. Des titres qui nous donnent le goût de nous plonger immédiatement et goulument dans le bouquin, le film, la série télé ou le disque. Il y a des titres qui sont tellement géniaux qu’on sait dès sa lecture qu’on a entre les mains une œuvre qui va avoir une influence sur nous. J’irai cracher sur vos tombes, fais partie de mon palmarès des titres les plus efficaces.

                                                 


 Un titre plein de mystères. Un titre coup de poing qui dit juste ce qu’il faut savoir. Un titre qui met K.O le lecteur.

Lee Anderson et un superbe blond, baraqué comme un dieu. Fils d’une mère métisse, il quitte sa ville natale après le lynchage de son frère afro-américain. Imaginez son frangin avait eu la mauvaise idée de nouer une relation amoureuse avec une jeune fille blanche. Ce n’est pas vrai que l’amour triomphe de tout. Surtout pas dans la puritaine Amérique raciste de la première moitié du XXe siècle.

                                              


La pendaison sauvage de son frère le traumatise à un tel point qu’il décide de parcourir le sombre sentier de la vengeance. Une chance pour lui il peut passer pour un blanc. Un privilège qu’il utilise pour pouvoir assouvir ce désir de vengeance qui est en train de le dévorer. Deux jeunes femmes blanches issues de la bourgeoisie raciste et locale de Buckton, sa nouvelle ville d’adoption, deviendront ses victimes.

Adaptation de grande qualité du polar le plus connu du mythique Boris Vian, qu’il avait signé du pseudonyme de Vernon Sullivan, J’irai cracher sur vos tombes reste toujours aussi pertinent, et plus être mettre plus, que lors de sa sortie en 1946.


                                             


Violent et cru, le premier polar du génial écrivain était un portrait sans complaisance d’une Amérique sclérosée par son racisme intolérable, son puritanisme hypocrite et son ouverture d’esprit de façade. Comme si cette génération de l’élite bourgeoise, si bien décrite par F Scott Fitzgerald, n’était en fait qu’une multitude de sépulcres blanchis arrogants et ivres du pouvoir et des privilèges que la vie leur a donnés à la naissance.

Appuyé par un trio efficace de dessinateurs Ortiz, Scietronc et Macutay, Morvan explore avec brio l’univers mis en place par Boris Vian. Il lui insuffle la touche d’humanité nécessaire pour nourrir l’atmosphère torride et impitoyable du récit. Sous la plume du quatuor, l’Amérique qui cache sa décadence derrière ses parures scintillantes parait tellement vivante, tellement criante de vérité, tellement actuelle que ça en fait presque. Manifestement presque 75 ans après la parution de l’éponyme, rien n’a changé dans le royaume de Paul Revere.


                                                           


Et quand on y pense bien c’est peut-être ça qui est le plus inquiétant.

JD Morvan, Ortiz, Scietronc, Macutay, d’après le roman de Vernon Sullivan (Boris Vian) J’irai cracher sur vos tombes, Glénat.

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