La part de l’Ombre : l’assassin venu de Suisse
Par Robert
Laplante
De tous les attentats qui ont été commis contre Hitler, les plus connus sont sans doute celui de Johan Georg Elser le 8 novembre 1939 et celui de Claus von Stauffenberg le 20 juillet 1944 raconté. par Brian Singer dans : Walkyrie.
En
tout ce sont 42 attentats qui seront tentés contre le Führer, et ce, dès mars
1932. 42 tentatives d’assassinats dont il s’en sortira à chaque fois indemne et/ou
légèrement blessés, comme si le Diable lui-même le protégeait.
Parmi tous
ces complots, le 20e, celui du 9 novembre 1938, orchestré par
Maurice Bavaud, 22 ans, citoyen suisse et séminariste un peu rigoriste est
particulièrement intéressant. Pas tant le complot que ses répercussions aussi
surprenantes qu’insoupçonnées. C’est ce complot qui fait l’objet de l’enlevante
bande dessinée : La part de l’ombre signée Patrice Perna et
Francisco Ruizge.
Berlin-Est
12 décembre 1955, Guntram Muller, journaliste aguerri au Berliner Zeitung et
Wolf Fiala, un aspirant journaliste qu’il a pris sous son aile, assistent à
Berlin-Ouest à la lecture du verdict du procès destiné à réhabiliter la mémoire
de Bavaud. Bien que le tribunal annule sa condamnation à mort, lui qui avait
été guillotiné à la prison de Plötzensee au matin du 14 mai 1941, le juge le
condamne à titre posthume à cinq ans d’emprisonnement. Pour le magistrat, la
vie d’Hitler était protégée par la loi comme celle de n’importe quelle autre
personne, ses actes ne justifiaient pas son meurtre.
Un verdict
révoltant surtout pour Muller. Muller qui sait des choses, beaucoup de choses.
Muller qui dans une autre vie avait été inspecteur pour la Kriminalpolizei berlinoise.
Muller, qui avait enquêté sur l’affaire Bavaud, Muller qui l’avait même
rencontré en prison pour connaitre le commanditaire du complot parce qu’il
était certain que le Suisse n’avait ni la force psychologique ni la froideur calculatrice
pour organiser pareil plan.
Avec son sens du rythme et son efficacité narrative Perna, construit case par case un suspense cinématographique qui nous garde constamment en haleine. Avec ses judicieux retours dans le passé, ses allusions sur le silence condamnable des pouvoirs politique et législatif allemands sur le régime nazi comme dans l’excellent film Le labyrinthe du silence,
la guerre froide, la déstalinisation et
le besoin de la RDA d’être reconnue comme une nation à part entière et non pas comme
une création de l’URSS, le bédéiste concocte un solide scénario passionnant
appuyé par le dessin élégant et la dynamique mise en page teintée d’urgence de
Ruizge. Il y a dans le tragique destin de Bavaud le matériau avec lequel se fabriquent
les grands drames.
Quant à
Bavaud un deuxième verdict, en 1956, infirmera la décision de 1955 et obligera
Bonn à verser à sa famille 40 000 francs suisses en réparation. Pour ce
qui est d’Hitler, après la tentative ratée de Bavaud son service de sécurité
sera augmenté, et la légende veut que Guillaume Tell de Rossini n’ait plus
jamais été joué en sa présence
Patrice
Perna, Francisco Ruizge, La part de l’ombre tome 1 Tuer Hitler,
Glénat.
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