La chute, promenade sur un chemin apocalyptique très fréquenté.

 

                                                              


 Par Robert Laplante

 

Ce qui m’avait impressionné avec le premier tome de La chute du bédéiste Suisse Jared Muralt c’était son « timing. » Sortie, du moins au Québec, au tout début de la pandémie, La chute traitait d’une société aux prises avec une puissante pandémie. Une pandémie qui la déstructurait totalement, détruisait la solidarité entre les individus et exacerbait l’individualisme de tout un chacun. Ce qui faisait l’intérêt de cette bande dessinée, outre le grand talent de conteur de Muralt et son graphisme efficace, c’était la coïncidence avec une situation que nous étions en train de vivre.

                                              


Je ne sais pas si c’est moi, épuisé par plusieurs mois de confinement, de pandémie et de couvre-feu, ou si c’est tout simplement le changement d’arc narratif de La chute, mais le deuxième tome, qui vient de sortir, m’a semblé beaucoup moins pertinent que le premier.

Ce nouvel album commence là où se concluait son prédécesseur. On se rappelle qu’il se terminait par la fuite de Liam et de ses enfants vers la campagne isolée qu’ils espéraient épargnée du chaos d’une société qui s’écroulait rapidement, trop rapidement. Mais la beauté du chaos c’est qu’il se propage rapidement et que nul endroit n’y échappe.


                                   


Si dans le premier tome Muralt faisait preuve d’originalité et d’un excellent sens du rebondissement, on ne peut dire en dire autant ici. Loin de continuer à observer la destruction de la société sous l’impulsion de cette impitoyable pandémie, le bédéiste préfère se concentrer sur les relations entre les différents groupes d’humains, disséminés ici et là dans cette campagne perdue au milieu de nulle part, contaminée par la méfiance, par la peur de la pandémie et des autres et par le manque de solidarité. Des individus qui tentent tant bien que mal de survivre et de se défendre des groupes plus agressifs.

Et c’est ici que le bât blesse. Le sentier que le créateur a décidé d’emprunter est exploré depuis plusieurs décennies. Les affrontements post-apocalyptiques entre groupes ont été au cœur de plusieurs œuvres de fiction, et ce, depuis plusieurs décennies. Pire encore elles se ressemblent presque toutes.

Manifestement, c’est aussi le cas pour La chute qui ne parvient plus dans ce chemin, mille fois emprunté par d’autres, à se distinguer. Ce qui nous laisse un gout de déception à la conclusion de ce nouvel épisode, celui du déjà vu

C’est dommage qu’il se soit égaré sur cette piste un peu trop prévisible et un peu trop fréquentée. S’il avait continué à s’intéresser à la pandémie et à ses effets sur une société prête à imploser, il aurait gardé sa pertinence et sa spécificité. Ce qui n’est présentement pas le cas avec ce deuxième tome. Bien sûr il propose une bande dessinée honnête, mais ni meilleure, ni pire que les autres du même acabit.

Mais entendons-nous, ça reste une bédé qui se laisse lire avec plaisir. Le dessin et le scénario sont solides. Muralt à un talent indéniable. Mais je ne trouve pas dans ce nouvel opus le souffle épique du premier.

Attendons le troisième tome avant de se prononcer. On ne sait jamais, je vais peut-être y retrouver ce que j’avais tant apprécié dans le premier.

Jared Muralt, La chute, tome 2, Futuropolis.

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