Un avion sans elle : Trois familles et un couffin.

                                                                         


                                                      

 Par Robert Laplante

Il est difficile d’imaginer la douleur de celui ou de celle qui perd son enfant. Il est aussi difficile d’imaginer la douleur de celui et de celle qui perd tragiquement non seulement son enfant, mais aussi son petit-enfant. C’est ce que vivent les Vidal et les Carville, deux familles qui ne se connaissent pas, qui n’ont aucun lien de parenté et que tout sépare sauf la douleur d’avoir perdu leur petite-fille, qui est âgée de quelques mois seulement, lors de l’écrasement du vol Istanbul-Paris le 23 décembre 1980.

Enfin ce n’est pas tout à fait vrai. Une des deux petites-filles a survécu. Le hic c’est que personne ne peut l’identifier. Il ne faut pas oublier qu’au début des années 80 l’ADN n’est pas très utilisé, en tout cas beaucoup moins que dans les séries policières télévisées américaines de l’époque.

Qui sont les véritables grands-parents de celle que les médias surnomment la petite libellule? Les tribunaux doivent donc trancher ce nœud gordien aux immenses répercussions émotives. Les tribunaux et un privé, Crédule Grand-Duc, engagés par Mme Carville pour faire la lumière sur la véritable identité du poupon.


                                         


Nouvelle adaptation dessinée d’un roman de Michel Bussi, Un avion sans elle est une bédé policière pleine de rythme et diablement efficace. Il faut dire que Bussi a tout pour intéresser un auteur de bande dessinée. Non seulement il est l’un des auteurs qui cartonnent le plus en France, mais en plus il met en scène avec verve et moult rebondissements des enquêtes bien ficelées et profondément humaine. Bussi sait raconter des intrigues qui touchent les préoccupations quotidiennes de Monsieur-Madame-tout-le-monde. Exit les grandes organisations criminelles internationales, les conspirations, les tueurs en série et les détectives . Le monde de Bussi est truffé de petits crimes anonymes, ceux commis par des quidams qui nous ressemblent, qui pourraient faire partie de notre vie.

 

 

Mais ce n’est pas parce que Bussi fait des romans fascinants à l’écriture aussi vivante qu’efficace qu’ils peuvent être adaptés avec succès par un autre médium. L’histoire de la culture est remplie de ces tentatives ratées. Mais heureusement ce que n’est pas le cas avec Un avion sans elle. Il faut bien reconnaitre que Fred Duval a trouvé les clés pour bien traduire en bande dessinée la richesse des romans de l’écrivain, géographe et professeur à l’Université de Rouen.


                                        


Mais Fred Duval n’est pas à son premier galop avec Bussi. Son Nymphéas noirs adapté de son roman éponyme m’avait tellement impressionné il y a quelques années qu’il avait figuré dans mon top 10 de l’année. Fred Duval, un as de scénario -l’excellente série uchronique Jour J c’est lui – avait avec Nymphéas noirs traduit brillamment l’univers, l’intrigue et les mots du romancier tout en gardant sa touche personnelle. Cette touche qui en fait un scénariste que j’adore.


                                    


Si son adaptation de Nymphéas noirs m’avait impressionné, il en est de même avec:  Un avion sans elle. Il y a un petit quelque chose dans sa nouvelle bande dessinée d’irrésistible. C’est peut-être sa narration presque cinématographique, ses aller-retour constants entre le passé et le présent, ses indices habilement disséminés tout au long des pages, son rythme narratif enlevant, l’intelligence de sa narration ou la justesse de ses dialogues, à moins que ce ne soit la combinaison de tout ça. Je ne saurais dire. Mais ce que je sais par contre c’est que j’ai eu l’impression moi aussi de mener l’enquête.


                               


Appuyé par le dessin d’une discrète efficacité de Nicolai Pinheiro, qui se met au service du récit, Fred Duval traduit avec justesse la force évocatrice de la plume de Bussi. Avec le résultat que la BD capte notre attention dès la première case tout comme le roman m’avait happé dès ses premiers mots.

Qu’il est agréable de voir que Bussi aussi bien adapté en bande dessinée. J’espère que Fred Duval continuera d’explorer et de faire rayonner l’univers de ce romancier populaire, dans le sens le plus noble du mot.

Une belle réussite

Fred Duval, Nicolai Pinheiro d’après le roman de Michel Bussi, Un avion sans elle, Glénat

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