Partir pour rester

 

                                                                 


Porca Miseria

Par Tonino Benacquista

Gallimard

195 p

«  Il me suffirait d’un moment. Un seul, mais issu de la pure réalité. Un souvenir, un geste, une anecdote bel et bien vécue par eux pour me convaincre que Cesera et Elena étaient aussi capables du meilleur. Ce seul moment, raconté à un inconnu, lui ferait dire : " J’aurais aimé les connaître". C’est ce que vous allez découvrir dans le très joli chapitre intitulé : L’anchois et l’hôtesse de l’air. En fermant ce livre constellé de souvenirs d’enfance, mais pas que cela, j’ai immédiatement songé au regretté François Cavanna qui nous contait avec délice et beaucoup d’humour, le quotidien des Italiens à Nogent-Sur -Marne trente ans auparavant avec Les Ritals . De cette communauté italienne qui avait fui non pas le fascisme, mais la misère, Cavanna en a tiré les plus beaux passages sur l’immigrant, la vie de quartier, le papa bourru aimant, et sa mère française, qui se désolait de temps en temps que son mari, soit trop gentil (entendons se faire exploiter).

Chez Tonino Benacquista, dont la famille s’établit en France en 1954, nous sentons également ses liens ténus, parfois imaginaires avec la terre natale. De sa mère toujours contrariée et peu habituée aux subtilités de langue française et à un père qui cultivait le malheur, le petit Tonino démontre comment les enjeux d’une famille cristallisèrent son appartenance au sol français et plus encore la langue. Par de courts chapitres, celui qui devint célèbre avec La commedia des ratés (un peu l’histoire de sa famille qui servit de toile de fond), Saga ainsi que Malavita, puis le très beau : Toutes les histoires d’amour ont été racontées sauf une, offre un chant mélodramatique. Sauvé par la lecture, même s’il n’était pas le premier de classe, fuyant un père qui noyait son désarroi dans l’alcool, juste à la maison, Porca Miseria parle des déracinés, des gamins ayant suivi une autre voie et de sa petite famille qui, malgré ses défauts, fut le socle d’une enfance somme toute heureuse. Un chant d’amour finement ciselé où vous plongerez dans le méditatif, l’apprentissage, avec un passionné des arts qui rend aussi un sublime hommage à ses professeurs.

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