Golden West, Le crepuscule Apache.

 

                                             


Par Robert Laplante

Geronimo, un nom synonyme de terreur. Du moins pour les Américains du Sud-Ouest, les Mexicains et les gamins comme moi. Il faut dire qu’avec ses tristement célèbres exploits, réels ou non, et sa réputation de cruauté et d’insensibilité colportés par des médias et une culture en mal de sensations, la seule évocation du nom de l’impitoyable et impétueux guerrier apache avait tout pour semer l’angoisse et la peur chez les allochtones.

J’ai grandi avec ce Geronimo ainsi que : Sitting Bull, Crazy Horse et Cochise.

Plus tard, sans doute inspiré par ma passion pour Blueberry, j’ai lu ses mémoires chez Maspero, que j’ai encore m ainsi que Les cents premières années de Nino Cochise, petit-fils du grand chef apache ainsi qu’un nombre incalculable de livres et essais consacrés à ces premiers peuples qui ont façonné l’Amérique et la légende de l’Ouest.

Aujourd’hui, ma fascination de l’Ouest mythique est moins ardente. Cela ne m’empêche pas de fréquenter encore l’Ouest au gré des nouveautés culturelles. Surtout quand elles touchent cette période de la résistance apache comme Golden West de Christian Rossi. On peut difficilement renier ses premiers amours.

                                     


Golden West raconte le crépuscule d’un peuple fier, maître d’un territoire aussi magnifique qu’inhospitalier, qui voit peu à peu les Américains et les Mexicains l’expulser de l’Histoire. C’est aussi la figure légendaire de Geronimo qui fit trembler autant les Américains que les Mexicains, et qui a la tête de ses trop peu nombreux guerriers organise les derniers barouds d’une nation qui refusent de mourir désespérés.

Cette bande dessinée est plsu encore l’œuvre la plus personnelle de Christian Rossi. La première fois, je crois, qu’il assume totalement la trame et le dessin. Même s’il est vrai qu’à la mort de Charlier, il avait assuré la fin du scénario de Jim Cutlass.


                             


Graphiquement sa nouvelle bédé est superbe. Ses imposants paysages désertiques sont magnifiques et anxiogènes. La chaleur du soleil qui plombe sur les canyons paisibles est implacable et la lumière de l’astre du jour qui danse sur chaque grain de sable irradie chacune de ses cases. Sous sa plume le territoire apache devient une fournaise des damnés qui édicte ses règles et sa loi au petit théâtre humain qui y habite ou qui voudrait le peupler. Et dans ce petit théâtre, il y a ces Apaches. Ces Apaches qui y vivent depuis toujours, qui s’y sont adaptés parfaitement et qui connaissent ses respirations, ses mouvements et ses silences plus éloquents que tous nos mots. Golden West c’est toutes les qualités graphiques de Rossi mis au service d’un seul et unique album.

                                  


Si au fil des ans Rossi a travaillé avec les meilleurs scénaristes bédé, il n’est pas encore tout à fait à l’aise dans la narration. Bien que son dessin soit époustouflant et que son sujet soit séduisant, il reste qu’il aurait pu raconter son histoire plus efficacement.

Entendons-nous bien, il n’y a aucun moment mort. La bédé se lit d’un bout à l’autre sans interruption. On s’y amuse, en tout cas moi je m’y suis amusé, et on sent les hommages à toutes ces productions culturelles qui l’ont, et qui m’ont, nourries. Mais quelques fois, la structure me semblait moins solide, comme s’il n’avait pas donné le temps à son histoire de se mouler au rythme de la lente mélodie qui se dégage de ses dessins. Un peu comme l’avait fait Leone dans Il était une fois dans l’Ouest. Peut-être qu’un second tome aurait été parfait pour prodiguer à son Golden West le souffle scénaristique que la musique silencieuse des désertiques territoires apaches demandait.

Dommage.

Christian Rossi, Golden West, Casterman.

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