Brigantus : Du sang romain dans les Highlands.

 

                                                


Par Robert Laplante

Ça faisait longtemps qu’il n’avait pas fait de péplum notre ami Hermann. Depuis 1975, si je ne m’abuse. À l’époque, il racontait avec Jean-Luc Vernal les exploits du prince numide Jugurtha. C’était presque avant le déluge, quand son trait était encore hésitant et un peu coincé dans les paramètres imposés par le journal Tintin. Bref on était loin du Hermann confiant et assumé d’aujourd’hui.

Je ne sais pas pourquoi il a décidé, presque 49 ans après son dernier coup de crayon « jugurthaesque, » de revenir au péplum. Mais il faut bien avouer, par Jupiter, que son Brigantus est une sacrée bonne bd.


                                


Si Jugurtha n’a pas laissé de trace mémorable dans mon imaginaire, Brigantus, lui, a déjà sa place parmi ses grands crus. Il faut dire qu’avec son trait nerveux, violent et sauvage, le dessinateur ne pouvait rêver de meilleur terrain d’expression.

Highland, 84 après l’ère commune, une quarantaine d’années avant la construction du mur d’Hadrien, l’invasion romaine en Grande-Bretagne piétine dans les terres septentrionales. Malgré une série de forts destinés à imposer la présence romaine sur le territoire, les Pictes sont constamment sur les dents et ne laissent aucun répit aux forces d’occupation.



                                   




Brigantus est un soldat de l’Empire stationné en Écosse. Monstrueuse montagne de muscles, il est autant craint des Pictes que de ses propres frères d’armes. Ce qui ne l’empêche pas, comme tous les autres soldats, sous l’ordre de ses supérieurs de piller les différents villages des locaux que sa cohorte croise. Il faut bien nourrir l’armée stationnée dans ce bout du monde, et les Pictes eux en ont des réserves.

                                       


Les exactions impériales ne font pas faiblir la résistance picte. Au contraire ! à l’aide de à une habile technique de guérilla, la centurie de Brigantus est harcelée par les guerriers calédoniens. Inexorablement, grâce au brouillard qui noie les hautes terres du territoire, ils l’exterminent presque au complet.

Commence alors pour les derniers rescapés une fuite à travers les paysages sauvages et indomptés des Highlands. où le péril surgit derrière chaque nappe de brume. Hélas, pour Brigantus les Romains sont peut-être plus dangereux pour lui que les Pictes.

                                  


J’ai beaucoup aimé Hermann. C’était de plus un de mes bédéistes préférés. Un des rares dont j’achetais automatiquement chaque nouvelle parution. Toutefois, depuis une dizaine d’années, depuis Station 16 éditée en 2014, je le suivais moins. Même si son dessin était toujours aussi puissant, évocateur et parfait, je ne me trouvais plus dans ses propositions. Tout ce que j’adorais chez lui me semblait absent.

Mais ça, c’était avant Brigantus. Parce qu’avec Brigantus j’ai retrouvé le Hermann que j’aimais tant. Celui qui me scotchait à chaque nouvelle publication.

Hermann illustre avec brio toute la fureur de ces rencontres inégales entre les forces d’occupation romaines et les résistants pictes. Le théâtre chaotique où tout s’écroule et où les pires aspects de la nature humaine ressortent sied à merveille à son trait coup de poing. Loin de la retenue d’un Jacques Martin par exemple, Hermann explore la violence, la sauvagerie et les atrocités de cette conquête qui écrase tout sur son passage.

                              


Et puis il y a son Écosse. Une Écosse pleine de secrets, inviolée et indomptable, baignée dans des brumes aussi mystérieuses qu’inquiétantes. Une Écosse balayée par le froid, la pluie et cette maudite purée de pois constamment présente. Comme si les éléments naturels, les montagnes, les rivières et les plaines de la Calédonie s’unissaient pour expulser l’envahisseur du Latium.

Yves H, dont je ne suis pas le plus grand admirateur, concocte pour Hermann le scénario parfait. Celui qui permet à son dessinateur de père de nous bluffer encore une fois et de renouer avec ce chaos d’un monde qui s’écroule et qu’il avait si bien illustré dans Jeremiah et Comanche.

Coup de cœur Brigantus m’a longtemps habité après sa dernière page. J’ai tellement hâte de lire sa conclusion.

Du grand Hermann et une bédé irrésistible

Hermann, Yves H, Brigantus tome 1 Banni, Le Lombard.

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