Oradour-sur-Glane, le massacre du 10 juin 1944

                                                          


Par Robert Laplante

Il y aura bientôt 80 ans, le 6 juin, plus précisément, les alliées accostaient sur les côtes normandes. Un débarquement que les forces d’occupation allemande croyaient presque impossible.

Le 8 juin, 2 jours après ce coup de bélier dans le mur de l’Atlantique, la terrible division SS Das Reich stationné à Montauban et chargé de démembrer la résistance dans la région de Tulle-Limoges, recevait l’ordre de rejoindre le front normand au plus tard le 11 juin. Ce qui lui donnait quelques jours pour lutter contre les résistants de la région.

                               


Forte de sa réputation de férocité, la SS Das Reich, composée entre autres de Malgré-nous, Alsaciens et mosellans incorporés de force, mais pas toujours, dans : la Heer, la Luftwaffe, la Kriegsmarine et la Waffen-SS, s’attaqua impitoyablement aux présumés foyers de résistance.

Redoutable division qui a laissé son empreinte démoniaque sur le front de l’Est, notamment dans les Balkans, en URSS et en Ukraine, Das Reich imposa, à la Nouvelle-Aquitaine sa conception de la répression. À Tulles, par exemple, elle fit pendre aux balcons et aux réverbères de la commune 99 hommes, sans lien avec la résistance, et en déporta 149 autres.


                              


Pourtant, aucune des tueries dont elle sera responsable sur le territoire français n’atteindra l’ignominie du massacre d’Oradour-sur-Glane, un petit village tranquille où les maisons furent pillées et détruites et 642 villageois, hommes, femmes et enfants assassinés froidement. Comme si les SS voulaient effacer toutes les traces de cette petite bourgade coincée au cœur d’une violente furie irrationnelle.

                          




Deux intéressantes bandes dessinées viennent d’être publiées pour nous rappeler l’importance de ce funeste événement. Symbole de la violence incontrôlée, de la folie meurtrière, de la soumission presque religieuse et de la froideur inhumaine de ces divisions SS fières de leur implacable cruauté. Deux bandes dessinées qui, même si elles racontent la même histoire, sont aussi passionnantes l’un que l’autre, que nous devons absolument lire une à la suite de l’autre. Pour saisir encore mieux l’importance de ce qui s’est déroulé ce 10 juin 1944 sur les terres d’Oradour-sur-Glane.

                           


La première : Oradour-sur-Glane publiée aux éditions Petit à Petit signée Philippe Tomblaine, Maria Ricco, Emanuel Cerisier et Arnaud Joufroy, met en contexte le massacre. Grâce à son habile alternance de courts chapitres dessinés et de petits dossiers historiques, une caractéristique de la maison d’édition rouennaise, les auteurs nous donnent les éléments nécessaires pour mieux comprendre, si cela est possible, cette terrible tragédie.

                               


Les créateurs s’intéressent aussi à l’après Oradour, sa reconstruction physique et psychologique et l’audience du 12 janvier 1953. Procès où ont comparu 19 soldats de la Waffen-SS Das Reich, dont 13 Malgré-nous, soutenus par la population alsacienne, qui seront finalement amnistiés au nom de la réconciliation nationale. Mais par-dessus tout, la bd met en scène la lutte des 6 survivants, pour que le souvenir de cette dramatique journée ne disparaissent jamais.


                                        


La seconde : Oradour, l’innocence assassinée de Miniac et Marivain se consacre surtout à l’évolution de ce fatidique 10 juin. À partir du destin de quelques Radounauds, notamment ceux qui en réchapperont, les auteurs adoptent un polaroid presque journalistique de ce moment. Comme s’ils étaient des reporters qui voulaient témoigner minute par minute du désastre qui se déroulait dans le petit village martyr de la Haute-Vienne.

Les deux bédés ont aussi pris le judicieux pari de respecter l’histoire et de ne pas raconter le massacre à partir d’éléments fictionnels. Comme s’ils pensaient, à juste titre, que la charge émotionnelle qui se dégageait de la tragédie était suffisante pour capter et garder la colère du lecteur. Lui faire ressentir la peur, l’angoisse et l’incrédulité, en partie seulement parce qu’il est impossible de mettre des mots sur l’inimaginable, qu’ont dû vivre les villageois devant la sauvagerie inhumaine qui s’abattait sur eux.

                                 


Je ne saurais trop vous recommander de lire ces deux histoires qui se complètent à merveille. Parce qu’Oradour-sur-Glane ne doit pas être oublié, et surtout pas en cette année de son 80anniversaire.

Tout comme on ne doit pas omettre la tragédie de Marzabotto en Italie entre le 29 septembre et le 5 octobre 1944, celle de Distormo en Grèce, elle aussi le 10 juin 1944 et celles de Ležáky et de Lidice en Tchécoslovaquie en juin 1942 en représailles à l’assassinat du SS-Gruppenführer Reinhard Heydrich.

Et ces deux bandes dessinées nous permettent de garder le souvenir d’Oradour-sur-Glane bien vivant dans notre mémoire, qui aime tant oublier.

Philippe Tomblaine, Maria Ricco, Emanuel Cerisier, Arnaud Joufroy, Oradour-sur-Glane, Petit à Petit

Miniac et Marivain, Oradour, l’innocence assassinée, Anspach

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