Vautours : Beaucoup de bruit pour rien

 

                                                      


Par Robert Laplante

Je ne sais pas pour vous, mais je commence à en avoir un peu marre des polars. Je trouve qu’il y en a trop, et qu’ils racontent fréquemment la même histoire.

À vrai dire, ce qui me fatigue c’est le nombre effarant de prétendus polars où l’auteur passe plus de temps à décortiquer la vie personnelle des enquêteurs qu’à rattacher les fils des enquêtes, qui reposent sur des indices tellement minces qu’on pourrait voir au travers. Dans ces cas-là, j’ai l’impression que bien souvent la montagne accouche d’une souris.

                                              


C’est mot pour mot le cas de Vautours, le récent polar dessiné de Miguelanxo Prado et le deuxième opus de sa série Proies faciles. Pourtant, scénaristiquement et graphiquement,, il en a des qualités, ce nouveau Prado. Mais comme l’écrivait Shakespeare, c’est « beaucoup de bruit pour rien. »

Irina, une adolescente adoptée de 15 ans, est retrouvée morte dans sa chambre. Si la police conclut rapidement à un suicide, l’inspectrice Tabares et son adjoint Sotillo, eux, en doutent sérieusement. En fouillant un peu, ils mettent la main sur la tablette d’Irina qui comporte plusieurs photos d’elle, plutôt dévêtue. De quoi sonner des cloches aux deux fins limiers. D’autant plus que la hiérarchie judiciaire semble légèrement trop prompte à enterrer le dossier. Et si les deux enquêteurs se trouvaient devant un réseau de pédocriminalité orchestré par ses parents adoptifs et un haut magistrat de la justice espagnole qui les connaît bien ?

                                   


Je suis un amateur de Prado. J’ai toujours un plaisir fou à me plonger dans ses histoires. J’aime aussi la bédé et les polars espagnols. Donc en principe j’aurais dû prendre mon pied en consultant ce nouveau Prado. J’ai eu tout au long de ma lecture, l’impression qu’il y avait quelque chose qui clochait.

Peut-être que c’était à cause des interactions entre l’inspectrice Tabares et son adjoint Sotillo. Des relations tendues, pleines de malaises, de non-dits et de rendez-vous ratés, qui en bout de piste n’apportent pas grand-chose de neuf. En tous cas rien pour écrire à sa mère.

À moins que ça soit ma méconnaissance de la série qui a joué contre moi. Je n’avais pas lu le premier volume et il me manquait des clés pour bien comprendre leur petit univers. Curieusement je me suis senti exclu de l’intrigue, comme s’il ne s’adressait pas à moi, mais aux initiés du premier tome.

Il y avait aussi la proposition de départ, inspirante aux parfums sulfureux d’un scandale judiciaire et peut-être politique. Bien qu’attrayante, elle ne tient pas la route. Avec le résultat, la bédé ressemble plus à un pétard mouillé qu’à un brûlot incendiaire.

                                  


Pourtant la première moitié de l’enquête était porteuse. L’ambiance froide, glauque et déprimée que mettait en place Prado, laissait entrevoir un récit coup de poing. Mais une fois le ravissement passé, l’album a vite perdu de sa curiosité. Comme si l’auteur se sentait moins concerné par son récit ou qu’il savait qu’il ne pouvait pas, pour toutes sortes de raisons, répondre aux promesses initiales.

Entendons-nous bien : Vautours est une BD intéressante. Mais elle ne se démarque pas vraiment de ce qui se fait depuis plusieurs années. Mais quand même ne soyons pas trop sévère, il reste que c’est du Prado et cet un immense plaisir pour les yeux. Mais je m’attendais à plus…

Mais bon ça c’est mon problème. La lecture du premier tome m’aurait sans doute permis de mieux l’apprécier.

Miguelanxo Prado Proies faciles, vautours. Rue de Sèvres.

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