Les Beatles à Paris : Beaucoup de bruit pour rien.

 

                                                       


Par Robert Laplante

Une fausse bonne idée.

Quelques fois, on a de fausses bonnes idées. Ces idées qui paraissent absolument géniales sur le coup. Mais qui sont loin de tenir la route. C’est exactement, le cas des Beatles à Paris, une bande dessinée qui se consacre au passage du Fab Four, dans la capitale française du 14 janvier au 5 février 1964.

Le séjour parisien des 4 garçons dans le vent est important, puisque c’est à partir de leur escale dans la Ville lumière que la Beatlemania va déferler sur l’Europe et sur les États-Unis après avoir conquis l’Angleterre. Cette visite joua un rôle fondamental dans la mythologie de ces quatre jeunes.

                                


Ce sont donc ces trois semaines, qui sont au cœur de la bédé des scénaristes Vassilissa et Philippe Thirault et du dessinateur Christophe. Malheureusement, si le sujet semble de prime abord très séduisant, il faut bien avouer qu’en bout de piste Les Beatles à Paris ne se démarque pas vraiment. Pire encore, elle est même un peu décevante.

Il y a des moments intéressants : la frénésie des concerts, les séances photo, les rendez-vous avec la presse, la vie dans les chambres d’hôtel, quelques souvenirs de jeunesse, leur fascination pour Brigitte Bardot, les rencontres avec le réalisateur Richard Lester où s’ébauche timidement l’intrigue de Hard Day’s Night, leur relation avec leur équipe et l’amitié et l’humour qui les unissent. Mais dans l’ensemble je n’ai pas été convaincu.

                                         


En choisissant de faire une courtepointe d’anecdotes pas toujours liées entre elles, en suggérant des personnages désincarnés presque plaqués artificiellement dans le récit et en adoptant une narration qui ne traduit ni la folie, ni la dérision des Fab Four, les auteurs proposent une version 2024 des Belles Histoires de l’oncle Paul, pour ceux qui se rappelle cette série du journal Spirou.

                                         


Il n’y a pas que le scénario qui m’a déçu, le dessin aussi. Non pas que Christophe n’ait pas de talent, au contraire. Mais sans que je sache pourquoi je l’ai trouvé trop propre, trop gentil, trop dans les clous, pas assez personnel, émotif et souple. Je n’y ai pas retrouvé, comme dans le scénario d’ailleurs, cette étincelle d’un optimisme délirant qui animait et les Beatles et cette jeunesse en train de « virer sur le top » et de faire table rase du passé.

                                          


Peut-être que la bédé aurait été plus efficace si elle avait été un court récit, intégrée par exemple dans un hommage consacré aux Beatles. Peut-être que dans un format plus court je n’aurais pas eu l’impression que la bédé était inachevée et que les auteurs manquaient de matière.

                                       


Le ciel pourrait être rouge sur Almeria.

Restons encore un peu au début des années 60 avec Guy Lefranc, qui nous propose une nouvelle aventure : Bombes H sur Almeria. Que j’ai bien aimé. Une surprise pour moi qui n’a pas été tendre à propos de ses dernières enquêtes.

                              


Printemps 1963. À la suggestion d’Ernest Hemingway, Lefranc se rend en Andalousie pour repérer la trace son oncle Antoine mort mystérieusement pendant la guerre civile. À peine arrivé à Almeria, Lefranc se retrouve au cœur d’une catastrophe au potentiel apocalyptique. Deux avions militaires américains, dont un qui transportait quatre bombes H, entrent en collision au-dessus de la ville portuaire. Malgré les efforts de l’armée américaine et du gouvernement espagnol pour passer sous silence cet incident, Lefranc décide de mener son enquête. Et si cette collision aérienne lui permettait aussi d’élucider le décès de son oncle…

                                  


Écrit par Roger Seiter et dessiné par Régric : Bombes H sur Almeria nous transporte en pleine guerre froide, dans une Espagne dirigée d’une main de fer par Franco, ravagée par les plaies toujours saignantes de la guerre civile et déchirée par la haine que les nationalistes portent envers les républicains.

Bien sûr ça reste du Lefranc, il n’y a pas de grandes révélations scénaristiques et graphiques. Régric suit à la perfection la recette Martin, même si quelques fois on le sent un peu coincé dans le perfectionnisme « martinien » au parfum d’une autre époque.

                            


Idem pour le scénario, qui est toutefois très solide, logique et plausible que La route de Los Angeles ou encore Cuba Libre. Roger Seiter est à son habitude très respectueux des couleurs narratives du maître. Sa description en filigrane de la difficile cohabitation entre les vainqueurs et les perdants de la guerre civile est intéressante et ouvre un sentier riche que son héros pourrait bien visiter de nouveau. Enfin je l’espère.

Bref, un Lefranc qui m’a fait passer un bon moment. Ce qui n’arrive pas si souvent que ça.

Vassilissa et Philippe Thirault, Christophe, Les Beatles à Paris, Robinson.

Régric, R Seiter d’après Jacques Martin, Bombe H sur Almeria. Casterman

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