Des fruits bien étranges et cette chanson
Strange Fruit
la chanson d’Abel
Par Vincent Hazard( scénario)
A. Dan ( Dessin)
Aire Libre
128 p
« Les arbres du Sud portent un fruit étrange. Du sang sur leurs feuilles et du sang sur leurs racines. Des corps noirs qui se balancent dans la brise du Sud. Un fruit étrange suspendu aux peupliers ».
Cette chanson inoubliable, que la chanteuse Billie Holliday porta tragiquement, fut écrite en 1939 par le poète et activiste politique Abel Meeropol.
À la veille du festival du jazz qui va s’ouvrir jeudi et certains événements aux États-Unis, cette bande dessinée est capitale. Initialement conçue pour une émission de Radio France (2020), elle est devenue un récit qui entremêle la vie de Billie Holliday et celle de son parolier. Comme passionné de jazz, je connaissais l’histoire de Strange Fruit. Je la compare au roman de Don Tracy : La bête qui sommeille (Série noire, 1951 ; version originale publiée en 1937).
Mais, moins la vie tourmentée d’Abel Meeropol (1903-1986)
Billie après et avant
Nous sommes en 1956. Billie Holliday, épuisée par ses excès, chante dans un club de seconde zone.
Abe Meeropol, qui tient absolument à la revoir malgré les obstacles, lui rappelle gentiment qu’il est l’auteur de Strange Fruit et non elle. Il ne lui en veut pas, car sa vie a été détruite par ses écrits et par les hommes du FBI et les chiens de garde du maccarthysme.
Entre la biographie de Lady Day, le racisme ambiant et l’amitié profonde entre Billie et le saxophoniste ténor Lester Young,
cette bande dessinée est presque un miracle. Une œuvre puissante, puisque ces deux êtres seront inlassablement pourchassés par la police (la chanteuse et le parolier). Billie en fera les frais à trois reprises, alors qu’Abe devra déménager et accepter de petits boulots « patriotiques » (écrire des bluettes pour les soldats au front) afin que sa famille puisse subsister.
Et Strange Fruit n’a pas vieilli, malheureusement. Il dénonce toujours les injustices et la haine.
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