Le grain de riz : Les mots pour le dire.

 

                                                             


           

Par Robert Laplante

Nous sommes déjà rendus à la mi-octobre ! Misère. Bientôt, le soleil chaleureux, mais un peu distant, du début de l’automne cédera sa place aux froides pluies de novembre. Ce changement de saison pourrait plonger dans la mélancolie ceux qui regrettent les longues journées estivales. Pour vous aider à traverser cette transition vers l’hiver, voici deux bandes dessinées émouvantes imprégnées de mélancolie automnale.

Le grain de riz.

Elisabeth et Antoine rêvent de fonder une famille. Cependant, la réalité a décidé autrement. Très vite, le jeune couple doit faire face à la dureté de la fausse couche, à ses conséquences et à son lot de déceptions et de remises en question.

La bande dessinée émouvante « Le grain de riz » de Catherine Plessis-Bélair et Daniel Plaisance est une véritable merveille, une bédé qui m’a profondément touché et qui m’a accompagné longtemps après ma lecture. Comme l’avait fait « La brume » de Mireille St-Pierre, une autre de mes bandes dessinées préférées de l’année 2020, cette bédé abordant le deuil blanc, un deuil vécu dans la confusion, l’impuissance et l’isolement.

Catherine Plessis-Bélair a écrit sa première bande dessinée avec une délicatesse et une sagesse remarquables. Elle nous fait sentir, avec tact, subtilité, compassion et humanité, l’âme d’une mère éplorée, submergée et dominée par le flot imprévisible et insaisissable des émotions, des angoisses et de la culpabilité de ne pas avoir pu mener à terme le bébé qu’elle portait.

Grâce au talent artistique de Daniel Plaisance, « Le grain de riz » met des mots et des images sur cette tempête émotionnelle, solitaire et silencieuse, qui est difficile à partager avec les autres.

Parfois, les mots et les images ne suffisent pas pour capturer toute la détresse d’un drame. Ce n’est pas le cas avec « Le grain de riz ». De la même manière, « La brume » n’avait pas réussi à capturer toute l’intensité de cette expérience.

                             


Son odeur après la pluie.

Je n’ai jamais eu de relation proche avec un animal autre que mon poisson rouge décédé, Bubulle. Soit dit en passant, je n’ai jamais eu d’animal à cause de mes allergies. Si j’en avais eu un, j’aurais sûrement choisi un chat, qui correspond davantage à mon tempérament, plutôt qu’un chien.

                                   


Je ne suis pas un grand amateur de chiens. Je n’en connais pas beaucoup, à part celui de ma meilleure amie, un labrador noir, que je gardais souvent et dont la mort m’a attristé. Cependant, je n’ai jamais vécu ce sentiment profond de vide causé par le départ définitif du meilleur ami de l’homme et de la femme. Contrairement à mon amie, qui, plusieurs années après son long voyage, continue de remplir son âme. Certaines blessures ne cicatriseront jamais, et certaines réserves d’affection ne s’épuiseront jamais.

Cédric Sapin-Defour, l’auteur du livre « Son odeur après la pluie », pourrait certainement comprendre mon amie. En effet, il a lui-même vécu une relation remarquable avec un chien, une relation qui a été le fil conducteur de son roman acclamé par la critique et le public, et qui a connu un véritable succès en librairie, avec plus de 650 000 exemplaires vendus depuis sa sortie.

                              


Avant l’apparition du cinéma et du théâtre, c’est la bande dessinée qui sert de terrain de jeu à ce charmant bouvier bernois qui nous donne irrésistiblement envie de l’adopter. Signée José Luis Munuera, considéré comme l’un des meilleurs adaptateurs de romans en bande dessinée actuellement, l’adaptation est tout simplement superbe. Une BD où l’on rit et l’on pleure au rythme des saisons et des années qui défilent trop rapidement.

Loin des histoires dégoulinantes de bons sentiments sirupeux à la Marley et Moi, le récit de Sapin Defour, pétri d’humanité, de beauté, de solidarité et d’affection, touche même ceux qui, comme moi, sont moins sensibles à la relation d’amour entre les chiens et les hommes.

Munuera a admirablement mis en scène l’histoire du romancier, et le qualificatif n’est pas de trop. L’histoire se transforme presque en un conte poétique, où amis, conjoint et montagne sont le décor d’une relation amoureuse merveilleuse et éternelle.

Munuera, grâce à sa sensibilité artistique exceptionnelle, capture avec émotion les mots de l’écrivain. Ces mots résonnent encore dans ma tête, comme s’ils s’étaient installés en moi. Je n’ai jamais vu une relation entre un humain et un chien aussi vive en bande dessinée, aussi proche de celle que j’ai observée entre mon amie et Micky, son loyal labrador.

Quelques semaines après avoir terminé ma lecture, la bande dessinée continue de me hanter, à l’instar du sympathique bouvier bernois Ubac, qui est toujours présent dans les souvenirs de Sapin Defour.

Si, en 2023, la bande dessinée « Jim » de François Schuiten, qui explore sa relation avec son labrador, m’avait profondément touché, que dire alors de « Son odeur après la pluie » ? Sinon qu’elle m’a totalement chamboulé et que je me suis surpris à avoir quelques discrètes larmes devant son tragique, mais naturel, départ.

Une bande dessinée qui m’a fait regretter mes allergies, qui m’ont empêché d’avoir un chien ou un chat et de vivre une relation avec eux.

Catherine Plessis-Bélair, Daniel Plaisance, Le grain de riz, Mécanique générale.

José Luis Munuera d’après le roman de Cédric Sapin-Defour, Son odeur après la pluie, Le Lombard,

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